Une entrevue avec Louise Leroux, réalisatrice du documentaire « Femmes des casernes »

Louise Leroux nous plonge dans le quotidien des pompières de Montréal

Une entrevue de Charles-Henri Ramon 

Dans le cadre de la 38e édition des Rendez-vous Québec Cinéma, ce jeudi 5 mars, a lieu la première mondiale du long métrage documentaire Femmes des casernes, dans lequel la réalisatrice Louise Leroux suit sur une période de trois ans deux pompières du Service de Sécurité Incendie de Montréal et deux recrues qui tentent de se frayer une place à leurs côtés.

Nous avons rencontré la cinéaste, qui outre la réalisation, signe la direction photo, la prise de son et le montage du film. 

« À l’origine du projet, il y a cinq ans, je voulais proposer un film sur la formation des pompiers dans une école des Laurentides. Lorsque je suis arrivé là, j’ai constaté qu’il y avait dans la classe, 138 gars et seulement deux femmes. Je me suis dit que je tenais là un sujet plus intéressant. J’ai commencé mes recherches, et pour être bien honnête, je n’étais pas très sûre… J’avais les mêmes préjugés que tout le monde. Il a donc fallu que je démystifie tout ça,  pour finalement découvrir qu’il y a très très peu de femmes dans ce milieu-là. Cela fait environ 25 ans que les premières femmes ont rejoint les services d’incendie de Montréal. Aujourd’hui, elles sont à peine une trentaine. »

Après avoir tourné Pompiers boréals, la réalisatrice retrouve donc un environnement connu, bien que très différent. Mais ce moyen métrage réalisé au courant de l’été des grands feux en 2005 lui a grandement servi pour cette seconde immersion dans l’univers des pompiers. « Depuis cette expérience, je savais pertinemment que pour faire un film sur les pompiers, il faut des feux. Et pour avoir des feux, la seule façon, c’est d’être avec eux en tout temps. Mon but étant de prouver que les femmes sont capables de faire le travail, il fallait que je les filme en action, dans un gros feu. Pas dans un petit feu ni lors d’un appel de premier répondant, ce qui est maintenant 75% du travail… Je voulais les montrer tirant des boyaux, faisant les mêmes gestes que les hommes. Pour cela, j’ai été chanceuse car la ville de Montréal m’a donné un accès total. Une carte blanche qui incluait une place dans un camion-pompe. J’avais donc une place, mais une seule… il fallait donc décider si c’était moi où mon caméraman qui la prenait. J’ai hésité, ne sachant pas si physiquement je serai capable, car en plus de la caméra, il fallait que je porte tout l’équipement du pompier… (rires) Mon producteur Richard Blackburn, m’a convaincu, et m’a acheté le matériel. J’ai donc choisi deux pompières qui travaillaient dans deux casernes et sur des ‘shifts’ différents. »

Une fois dans le camion, il a toutefois fallu attendre plusieurs mois pour avoir un feu d’envergure à filmer. D’avril à fin octobre 2015 pour être précis. Ce qui explique pourquoi le processus de production a été très long. « Ça a été fascinant parce que je peux dire que j’ai vraiment vécu de l’intérieur ce que c’est que d’être une pompière. Pendant six mois j’ai vécu avec elles, j’ai mangé dans les casernes, j’ai dormi dans les casernes, je suis allée sur tous les appels avec elles… et j’ai tout filmé! Ce qui m’a permis d’avoir un accouchement, un arrêt cardiaque, un cadavre, bref de faire le tour du métier, dans ses moments les plus difficiles et les plus humains. J’ai aussi pu apprécier la dynamique qui se construit avec les gars dans une caserne. Je me suis intégré aux équipes. J’étais la deuxième femme… et pendant six mois j’ai pu voir les relations qui se créent. Ce qui me permet de beaucoup mieux témoigner de la réalité vécue par les femmes. Même si c’est un aspect que je n’aborde que par la bande. Car j’avais décidé dès le début que ce ne serait pas un film sur l’intimidation ou le harcèlement. Tout simplement parce que je ne voulais pas axer mon sujet sur des victimes, mais sur des femmes incroyablement fortes. Je crois sincèrement que ce sont des héroïnes ; je voulais qu’elles me montrent leurs exploits. Et au final, je suis très contente de mon choix. » 

Rappel 

La grande première a eu lieu le jeudi 5 mars à 18 h au cinéma Quartier Latin, en présence de la réalisatrice, de pompières, des membres de l’État-major du Service de Sécurité Incendie de Montréal, de nombreux invités de marque et des étudiantes des écoles de pompiers en uniforme. Un camion de pompier était présent de 17 h à 18 h pour le Tapis bleu.

Femmes des casernes sera présenté au Cinéma Beaubien dimanche le 8 mars dans le cadre de la Journée internationale de la femme et prendra l’affiche au Cinéma du Musée à compter du 13 mars 2020.

Entrevue réalisée par Charles-Henri Ramond, à Montréal le 24 février 2020.

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