Une entrevue avec Miryam Bouchard réalisée par Marc Lamothe dans le cadre de la série CES ARTISTES QUI ONT FAIT DES VIDÉOCLIPS

La réalisatrice Miryam Bouchard en entrevue avec Marc Lamothe pour un retour sur la création de nombreux vidéoclips dans les années 90

Une entrevue de Marc Lamothe dans le cadre de la série CES ARTISTES QUI ONT FAIT DES VIDÉOCLIPS (4 ) avec Miryam Bouchard

Miryam Bouchard, réalisatrice et scénariste s’est fait connaître du public avec de nombreuses séries, dont LES CHRONIQUES D’UNE MÈRE INDIGNE (2009-2011), MON EX À MOI (2015-2016), M’ENTENDS-TU (2018) et L’ÉCHAPPÉE (2016-2019).

Elle a aussi versé dans le documentaire avec des séries telles que CHRONIQUES DE LA VIOLENCE ORDINAIRE (2004) et LA GUERRE DES SEXES (2005).

On lui doit quelques courts métrages et de nombreux vidéoclips. Plus récemment, elle nous offrait son premier long métrage, MON CIRQUE À MOI (2020), une œuvre aux résonnances résolument personnelles. 

Nous avons au Québec célébré et embrassé l’arrivée des diverses cultures musicales alternatives au début des années 90. Un public captif et sans cesse grandissant suivait assidûment ce qu’on appelait affectueusement la scène locale. Punks, métalleux, alternos, gothiques, ska, trad et même les franges heavy du hip-hop et de la pop se retrouvaient tous sur les mêmes scènes des grands festivals québécois, dont les tournées Polliwog. La multiplication des groupes locaux, la création de programmes de subvention à la production et la demande sans cesse croissante pour des vidéoclips a vu cette industrie exploser dans cette décade.

C’est ainsi que le Québec a vu naître diverses maisons de production de vidéoclips, dont SPYKEFILM où Myriam Bouchard a fait ses débuts à titre de vidéaste. C’est de cette période bouillonnante que nous discuterons avec celle qui a tourné des clips pour des artistes variés, allant de Carmen Campagne à Plume Latraverse et de Don Karnage à Marie-Denise Pelletier, et pour un certain Tom Waits…

  • Pochette Plume
  • Marie Denise Pelletier
  • Pochette Dumais

 

CTVM.info : Quels souvenirs gardez-vous des années 90 et de vos années à réaliser des vidéoclips, soit entre 1995 et 1999 ?

Myriam Bouchard — C’était une période extrêmement effervescente musicalement. J’ai tellement de bons souvenirs de cette époque. Des fois, quand je vois l’engouement pour des festivals extérieurs comme Osheaga, je me dis « Ouin, mais vous n’avez pas connu les éditions du Polliwog ». L’industrie du clip d’alors atteignait un certain zénith. On pouvait tourner entre trois et cinq clips pour le même album. C’était énorme. Je pense au groupe Noir Silence pour lequel SPYKEFILM avait produit quelque 11 clips pour leurs deux premiers albums. Je me souviens de semaines où nous pouvions tourner près de 10 clips plus ou moins en même temps. On avait faim et on avait des couteaux entre les dents. On roulait sur l’énergie de la vingtaine. 

On avait de tout petits budgets. On multipliait les demandes de subventions et on était plutôt créatifs avec les locations d’équipement et les valeurs de certains clips. Un vidéo pouvait être tourné de jour avec le même équipement d’un autre clip qui lui était tourné de nuit, on recyclait des décors et accessoires, ce genre de créativité. Mon premier vrai gros budget était pour un clip de Nancy Dumais en 1998. 11 000 $ pour un tournage de deux jours en 16 mm. J’ai capoté ma vie…

Le mouvement Kino n’existait pas encore, financer du court métrage était très difficile et le seul endroit pour se faire remarquer était probablement la série LA COURSE AUTOUR DU MONDE. Il était donc important de tourner des clips pour se faire remarquer et se faufiler dans l’industrie. Ça nous permettait de développer notre métier tout en vivant dans un monde souvent imaginaire et de bénéficier d’une diffusion pour notre travail. C’était beau de voir cette scène s’éclater dans toutes les directions, de Me Mom and Morgentaler à Bran Van 3000, de Nancy Dumais à Banlieue Rouge et de Muzion à Dubmatique. Musicalement, cette diversité était belle à voir et c’était une belle époque pour évoluer dans ce métier.

Vous êtes la fille de Reynald Bouchard. Plus qu’un acteur, votre père était un poète, un clown et aussi un artiste de cirque. Est-ce que le goût de la narration, de raconter des histoires et partager du merveilleux vient de vos souvenirs d’enfance à le regarder travailler ?

Miryam Bouchard — C’est certain que j’ai longtemps pensé que j’avais une enfance normale, mais j’ai dû éventuellement réaliser que non. Aux yeux de bien des gens, ça peut sembler excentrique ; mais pour moi, c’était mon quotidien. C’est certain que j’ai grandi dans une succession de spectacles impromptus en guise de mode d’expression. Dans cet univers particulier, j’étais du genre timide et réservé. Je n’étais pas une enfant qui chérissait le désir d’être sous les projecteurs. J’étais la présentatrice des spectacles de mon père, mais après quoi, je m’assoyais en coulisse pour le regarder. J’aime beaucoup les coulisses de spectacle, regarder les artistes dans la lumière et être là, à leur écoute. Réaliser pour moi, c’est un peu ça. Tu mets en scène dans la lumière des acteurs et des interprètes alors que tu restes à l’arrière-scène. La réalisation me ramène à ce bien-être-là que je ressentais en coulisse. Jouer fait partie de ma vie. Jouer avec des costumes, des maquillages, des décors, des accessoires, des lentilles et des éclairages. On avait un énorme atelier de 5 000 pieds carrés dans lequel je pouvais faire du vélo pendant que mon père pratiquait sur son unicycle. 

 

Durant mes études au collège Brébeuf, j’ai commencé à réaliser des courts métrages et des photo-montages. Mon père était dans tous mes films, il était de tous mes tournages. On a fini par tourner des vidéoclips ensemble. On le voit entre autres sur des échasses dans un clip de Nancy Dumais. Le mari de ma mère a aussi joué dans certains de mes clips. J’ai donc plongé dans ce métier, entourée des gens que j’aime. Un tournage, c’est aussi créer une famille autour d’un projet et je tentais de reproduire ainsi ce que j’ai connu. 

Votre premier vidéoclip était une proposition non officielle sur une chanson de Tom Waits ? Pourriez-vous revenir sur cette initiative ?

 

Miryam Bouchard — Je sortais à peine de l’université Concordia quand j’ai joint SPYKEFILM. À mes débuts, je faisais un peu de tout, de l’assistance à la réalisation jusqu’au maquillage. Personne ne m’engageait comme réalisatrice, car je n’avais pas d’expérience en clip. J’avais fait des courts métrages à l’université. Certains de ces courts ont gagné des prix, qui me permettaient de profiter de la location d’équipement et de la pellicule. Je me suis donc créé une première expérience. J’ai tourné par moi-même un faux vidéoclip sur une chanson de Tom Waits, YESTERDAY IS HERE. 

On était deux sur l’équipe, Tamir Moscovici et moi. Tamir est devenu un réalisateur vedette de pub à Toronto et aux États-Unis depuis. On avait plein d’idées, une caméra Bolex à crinque, une lentille de projecteur et toutes sortes de plateformes qu’on avait patentées. Une partie du clip était tournée en campagne chez le deuxième mari de ma mère, un artiste peintre merveilleux du nom de Robert Wolfe que l’on voit brièvement vers la fin et pour qui j’avais énormément d’affection. On s’est ensuite déplacés jusqu’à New York pour filmer des ambiances, des scènes de pauvreté et des files devant des soupes populaires. Un tournage guérilla-style, évidemment. Yvan Thibaudeau, qui est maintenant un monteur établi, travaillait avec nous sur le montage du clip. Aujourd’hui, il œuvre sur les films de Daniel Roby et Ricardo Trogi, mais ce clip était son premier contrat. Nous avons donc découvert ensemble le montage, Yvan, Tamir et moi. 

Assez fière du résultat, et un peu naïvement, on a envoyé une copie VHS du clip à Tom Waits, via son agente, Kathleen Brennan qui est aussi son épouse. Tamir avait trouvé son contact dans le Blue Book, l’équivalent du guide de l’Union des artistes aux États-Unis. Elle nous rappelle assez rapidement pour nous dire que Tom Waits avait apprécié le clip et avait été touché que nous ayons investi nos économies dans le clip d’une de ses chansons. Il nous a donc permis d’envoyer officiellement le vidéo à MusiquePlus et à Much Music. Le clip a effectivement été accepté et a même joué en faible rotation durant quelques semaines. Et c’est ainsi que SPYKEFILM m’a offert mon premier contrat pour un vidéoclip officiel. 

 

(N.D.L.R. Le vidéoclip YESTERDAY IS HERE a joué à quelques reprises à sa sortie sur les ondes de MusiquePlus et de Much Music. Malheureusement, le clip est ensuite disparu de la circulation depuis les 25 dernières années.  Pour souligner la publication de cet entretien, nous sommes extrêmement fiers de souligner l’inestimable collaboration de MELS pour la restauration du vidéoclip YESTERDAY IS HERE dont il n’existait malheureusement aucune copie en circulation, avant aujourd’hui.  Grâce à Paul Bellerose, Camille Goulet et leur équipe de chez MELS, vous pouvez enfin admirer une version en haute définition du premier vidéoclip de Miryam Bouchard).

 

 

 

Vous vous sentiez comment à titre de réalisatrice dans cette industrie à cette époque ?

Miryam Bouchard — Plusieurs de mes modèles étaient féminins. Folle de documentaires, de nombreuses femmes comme Anne-Claire Poirier me fascinaient. J’ai eu Micheline Lanctôt comme professeure, ce qui a été très stimulant pour moi. Je regardais l’œuvre de Lyne Charlebois et je la trouvais tellement inspirante. Je ne vois pas tant cette période comme un truc basé sur le sexe des gens formant nos équipes. Nous avions tous à peu près le même âge, nous étions une génération avec les mêmes aspirations et portée par le même désir de tourner. Un tournage, c’est créer une famille autour d’un projet. Je n’ai pas vraiment subi de commentaires ou de traitements machos ou sexistes sur les tournages de mes clips. La télé et la publicité ont été un peu plus difficiles, car là je devais travailler avec des gens souvent plus âgés que moi, mais mes expériences en clip m’ont permis d’être rusée et de contourner ces attitudes un peu machos. 

 

Est-ce qu’il y a une approche Miryam Bouchard ? Est-ce qu’il y a un fil conducteur ou une signature qui nous permettent de reconnaître vos clips ?

Miryam Bouchard — Quand j’entends de la musique, dès les premières secondes, des images me viennent en tête. Un monde se dresse devant moi. Certains réalisateurs étaient reconnus pour développer des concepts forts et des clips souvent mécaniques. D’autres préfèrent mettre en scène des fictions, ajouter des dialogues même. Je crois que je suis plus lyrique, plus près du fabuleux, des atmosphères et de l’évocation. J’approfondis des ambiances et tente de développer des esthétiques qui se distinguent. Mais nous sommes toujours au service de la chanson, de l’artiste et nous devons garder en tête le public visé. Le clip reste pour l’artiste un outil promotionnel, aussi artistique soit-il. Carmen Campagne et Groovy Aardvark, c’est deux mondes et deux publics. 

Groovy Aardvark

J’ai choisi quelques clips dont j’aimerais que vous nous parliez de la genèse et du tournage. Vous avez notamment travaillé avec une de nos légendes vivantes, Plume Latraverse pour le clip LES PATINEUSES (1995). Parlez-nous un peu de cette rencontre ? 

Miryam Bouchard — Cela a été une très belle rencontre et un tournage simple et sobre. Plume connaissait mon père, et je crois même avoir visité sa résidence durant mon enfance. Il n’était pas du tout grognon avec nous, comme on m’avait pourtant dit qu’il était parfois. Il était arrivé avec un concept assez précis. Il voulait chanter dans le clip, il voulait voir la patineuse et illustrer le béret qui part au vent. C’était un clip très collé sur les textes, contrairement à mes autres clips.  Nous avons opté pour un tournage devant un écran vert. Esthétiquement, c’est réellement différent de mes autres clips. Je m’étais laissée porter par la collaboration, l’idée de lui permettre de faire le clip qu’il avait en tête, car c’est une chanson romantique écrite par un homme plus âgé que moi. Je me suis littéralement mise au service de Plume, de sa chanson et de sa vision. Il agissait pratiquement comme un coréalisateur.

 

Pour Marie-Denise Pelletier, vous réalisez MON ENFANCE -M’ATTEND (1996). Vous sortez ici du rock et de la musique -alternative pour travailler avec une artiste pop établie.

Ce clip est plus mécanique et repose sur des mouvements de Dolly. Parlez-nous un peu de ce tournage ?

Miryam Bouchard — Je vais t’avouer que j’étais super impressionnée. Marie-Denise, qu’on aime ou qu’on n’aime pas ce genre de musique, c’est une de nos très grandes voix. C’était une artiste inspirante avec qui j’avais le goût d’essayer quelque chose. On avait trouvé un lieu à Lac-Mégantic, un ancien observatoire en décrépitude, un peu comme la mémoire de son enfance qui s’effrite. Pour ce clip, j’ai eu accès à un budget et un confort qui était assez nouveau pour moi. J’ai dû aussi apprendre à travailler avec une équipe qui entoure l’artiste. Marie-Denise avait sa propre styliste, son maquilleur, son coiffeur et son entourage. J’entrais dans un train en marche. J’ai dû avoir un meeting de préproduction avec son styliste. Je n’avais jamais connu ce genre d’expérience avant. 

 

Pour Groovy Aardvark et leur collaboration avec Yves Lambert de la Bottine souriante, vous réalisez le clip BOISSON D’AVRIL de l’album VACUUM (1996). Comment développe-t-on quelque chose autour d’une chanson qui parle du monstre du lac Hertel ?

Miryam Bouchard — J’ai eu un plaisir fou avec ce tournage. J’adorais le mariage improbable de ces deux styles musicaux, le punk et la musique traditionnelle. À cette période, je filmais des reportages sur des soucoupes volantes pour le pilote d’une série pour TQS. J’étais dans un trip ovni. On était allé tourner à l’Île Sainte-Hélène. On s’était patenté une espèce d’aquarium pour pouvoir mettre la caméra sous l’eau. Tout le monde a été généreux pour ce tournage. En postproduction, on avait quelque 400 plans et coupes, c’était malade. Ça a été réellement monstrueux comme travail. Je me rappelle avoir passé deux nuits blanches sur ce montage. 

 

Vous avez travaillé à deux reprises avec Nancy Dumais, PARLER AUX ANGES qui fut un grand succès et SOUDÉ À JAMAIS (1997). Dans les deux cas, vous aviez choisi une approche esthétisée. Parlez-nous de cette collaboration ?

Miryam Bouchard — Nancy et moi avions d’abord travaillé sur le clip de SOUDÉ À JAMAIS. Nancy portait des lunettes et elle ne voyait pas grand-chose sans celles-ci. Nous avons dû travailler sur les reflets en fonction de ses lunettes. On travaillait avec de la pellicule et on pouvait plus difficilement faire des tests compte tenu du budget restreint et des limites de temps imposées. Pour SOUDÉ, on avait développé un concept sur et sous la terre. Sous la terre, c’était un peu comme une ruelle de bidonville sur la terre battue avec une église au bout du chemin. Nancy pouvait dans cette fiction passer d’un monde à l’autre. Je suis très attaché à ce clip. Mon père et moi, on adorait les films LE TEMPS DES GITANS (1988) et UNDERGROUND (1995), et je m’en suis librement inspiré. 

Pour PARLER AUX ANGES, j’avais trouvé une piscine intérieure vide et je trouvais le lieu très beau. Le lieu était naturellement bleuté et très moody. Les musiciens portaient des vêtements noirs très sobres et on travaillait avec diverses vitesses de ralentis. J’ai une obsession pour les parapluies et ce clip en contient plusieurs. Je crois que ça reste mon tournage favori d’entre tous. Pas nécessairement mon clip favori, mais un de mes plus beaux souvenirs de tournage.

Aujourd’hui en 2020, je ne sais pas si je réaliserais ce clip de la même manière avec des scènes avec des gens à genoux pour prier, mais à l’époque, ça passait bien. Le clip et la chanson ont été de gros succès. Tellement qu’après ce clip, on me demandait souvent de refaire un clip comme PARLER AUX ANGES. Je refusais, évidemment. Pourquoi refaire la même chose deux fois ?

Pourriez-vous nous parler du clip MYRIAM, chanson extraite de l’album LE FOETUS DE L’HORLOGER (1998) du groupe Les Mauvais quarts d’heure ?

Miryam Bouchard — La formation m’avait approché prétextant que je m’appelais Miryam, comme la chanson. J’ai écouté la pièce et j’ai eu des flashs de la série TWIN PEAKS. Il y a deux Myriam, celle de la chanson et moi, une dualité comme dans la série. Le bien et le mal, le black lodge et le white lodge, un peu comme un monde parallèle à celui qu’on voit. J’ai donc filmé la chanson dans cette ambiance. Comme TWIN PEAKS, on tournait à l’endroit, on tournait à l’envers. Il a fallu que le chanteur apprenne ses paroles à l’envers. Par la suite, les bandes sont jouées dans l’autre sens et l’inversion crée un rendu insolite. Pour ce clip, on a essayé divers essais de jeux de vitesse et créé un univers clos qui n’existe que dans ces trois minutes de chanson. 

Lien vers Les Mauvais quart d’heure :

https://vimeo.com/499370397/9099576a44

 

Une curiosité dans votre vidéographie, un clip hip-hop avec la chanson DON ONE (1999) de Don Karnage. Que gardez-vous de cette expérience ?

Miryam Bouchard — J’ai tellement eu de plaisir à tourner ça. L’artiste et son équipe étaient réellement sympathiques. Le film THE MATRIX (1999) venait de sortir et on trippait tous sur les longs manteaux de cuir noir. La gérante de Don possédait un véhicule T-Rex à trois roues. SPYKEFILM venait tout juste d’acquérir le logiciel Avid After FX et on pouvait donc faire exploser le T-Rex en post-production. C’était long à l’époque, des heures et des jours, pratiquement, mais on avait tellement de plaisir. On avait tourné les silos à grains sous l’enseigne Farine Five Roses, un terrain de jeu extraordinaire. Jean-Pierre Gauthier, l’un des fondateurs de SPYKEFILM était le directeur photo sur ce clip. On s’était offert un plan en hélicoptère libellule pour la fin du clip. 

 

Pour Vincent Vallières, vous réalisez FAUT QU’TU FESSES FORT DANS VIE de l’album TRENTE ARPENTS (1999). Le clip est tourné dans un centre commercial. Parlez-nous de l’approche artistique choisie pour cette chanson ?

Miryam Bouchard — Vincent Vallières et ses musiciens formaient littéralement un groupe à cette époque et tous les membres avaient brainstormé et on était arrivé avec cette idée. Vincent était vraiment jeune, il avait 19 ans et demi, genre. Je ne me souviens plus précisément pourquoi on avait choisi un centre commercial. Probablement parce qu’on tournait l’hiver et qu’on voulait éviter la neige et un tournage extérieur. Je crois qu’on avait développé un délire de Père Noël et de train de centre commercial. Le produit final servait bien la chanson, je crois, mais tu m’en parles et je n’ai pas revu ce clip depuis cette époque.

Vous avez réalisé plusieurs clips pour Carmen Campagne, LA diva des tout-petits dans les années 90. Parlez-nous un peu de cette autre collaboration ?

Miryam Bouchard — Carmen était une STAR pour les enfants, le marché était énorme et la demande était forte et pressante. J’ai réalisé une demi-douzaine de clips qui étaient dédiés à être distribués sur la cassette vidéo LA SOUPE A MON AMI sortie en 1997. Ce qui représente près de la moitié du contenu de cette VHS. La vache était omniprésente dans plusieurs clips de Carmen. J’ai développé une amitié avec PODZ à brainstormer avec lui des idées de mises en scène mettant en vedette ou en valeur des vaches… On a eu vraiment beaucoup de plaisir. Cependant, j’ai réalisé que de travailler avec des enfants était différent avec des défis distincts. Je n’avais pas encore d’enfant à l’époque. L’idée de travailler avec des animaux, des enfants et des décors permettait beaucoup de folie à l’écran. En guise d’exemple, j’ai travaillé avec une belette pour la chanson COLETTE LA BELETTE ou une version Beatles de la chanson PAS CAPABLE DE TIRER MA VACHE. C’était un autre modus operandi. C’était un gros budget avec trois semaines de tournage, un bon salaire, de bonnes conditions, trois réalisateurs qui se partagent deux monteurs qui roulent en parallèle. J’ai acheté mon premier ensemble de laveuse et sécheuse grâce à ce contrat.  

Y a-t-il eu une chanson que vous auriez aimé réaliser à l’époque ou un artiste avec lequel vous auriez aimé travailler à cette période, mais que la rencontre n’a finalement pas eu lieu.

Miryam Bouchard — Martine St-Clair. Elle préparait une sorte de comeback après cinq ou six ans d’absence. En 1990, elle avait eu un gros succès en France et ici avec LAVEZ, LAVEZ et en 1996, elle sortait enfin son album suivant, UN LONG CHEMIN. Je crois que ma proposition était un peu trop rock and roll. Finalement, le clip tourné était très simple et très sobre avec Martine assise dans un fauteuil et j’ai alors compris qu’elle était une personne réservée et que mon concept ne collait peut-être pas à sa personnalité. J’avais le goût de faire éclater l’image sage qui lui collait à la peau et la sortir de sa zone de confort.

 

 

 

Une entrevue de Marc Lamothe parue dans La Quotidienne CTVM  # 6783 datée mercredi 17-Jeudi 18 février  2021 © CTVM.info

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