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Une entrevue de Marc Lamothe avec Helen Faradji, directrice de la programmation du FCVQ 2024

Publié le 10 septembre, 2024
Publié le 10 septembre, 2024

«Cette année, la programmation du FCVQ est celle d’une approche généreuse, humaniste, branchée sur le monde et ses différents enjeux», nous dit Helen Faradji, directrice de la programmation du FCVQ 

Une entrevue de Marc Lamothe

Titulaire d’un doctorat sur le cinéma des frères Coen et de Quentin Tarantino, Helen Faradji est une auteure et une critique bien en vue depuis des années sur la scène québécoise.  Nous l’avons d’abord remarqué comme critique dans l’hebdomadaire ICI, puis membre du comité de rédaction de la revue spécialisée 24 Images, où elle sera notamment rédactrice en chef du webzine revue24images.com. Elle collabore à titre de critique de cinéma avec Radio-Canada depuis de nombreuses années, tant pour le web, la radio que la télé. Elle est également chroniqueuse culturelle pour le balado de Fred Savard. Helen Faradji est autrice de deux ouvrages consacrés au cinéma américain.  Voici qu’elle ajoute une corde à son arc, Directrice de la programmation du FCVQ. Nous avons voulu en savoir plus sur la programmation du festival qui se tiendra du 11 au 15 septembre.

 

CTVM.info — D’où vous vient cet amour du cinéma et avez-vous déjà considéré un métier qui n’impliquait pas de cinéma dans votre vie professionnelle?

Helen Faradji — Il vient de l’enfance, de ma mère notamment, avec qui on regardait avec un plaisir infini nos trois vieilles VHS de Singin’ in the Rain, Monty Python’s Holy Grail et Cabaret les samedis après-midis! La bougie d’allumage était là, le reste est arrivé presque tout seul! J’ai eu la chance, pour le moment, de pouvoir mêler cette passion à ma vie professionnelle et je croise les doigts pour que ça continue. 

CTVM.info — Parlez-nous un peu de ce qui vous branche personnellement à titre de cinéphile? Quel genre de films préférez-vous généralement?

Helen Faradji —  J’ai du mal à classer les films dans une boîte, et je ne pourrais pas vraiment identifier un genre de films qui me plaît. Mais je crois que ceux qui restent avec moi sont ceux qui bouleversent, même minimalement, mon rapport au monde. Ceux qui me le font voir autrement, qui me font perdre mes œillères (on en a tous et toutes), ceux qui me donnent immédiatement envie d’en parler aux autres pour qu’ils et elles vivent la même expérience!

CTVM.info — Si vous pouviez passer une soirée à discuter avec un personnage d’un de vos films favoris, qui choisiriez-vous?

Helen Faradji —  Ha ha ha, sans hésitation, le Dude, pendant une partie de bowling dans The Big Lebowski (1998) des frères Cohen.

CTVM.info — Vous avez été critiques de cinéma. Vous êtes maintenant programmatrice. Quelle différence faites-vous entre ces deux métiers?

Helen Faradji — Ce sont les deux facettes d’une même médaille. J’ai toujours considéré, à l’instar de Serge Daney, que le métier de critique en était un de passeur, de passeuse. Par les mots, les réflexions que l’on met sur un film, on crée un passage vers ce dernier. La programmation y ressemble, l’idée étant de créer des ponts entre un public et une œuvre, d’enrichir l’accès au cinéma en quelque sorte.

CTVM.info — Après une succession de nombreux directeurs artistiques en plusieurs années, souhaitez-vous donner une couleur spéciale à votre programmation? Quelle pourrait être la signature d’Helen Faradji en tant que programmatrice?

Helen Faradji — Les années le diront, j’espère, mais je crois que la couleur que je rêve de pouvoir donner à la programmation du FCVQ est celle d’une approche généreuse, humaniste, branchée sur le monde et ses différents enjeux. L’idée est de pouvoir mettre de l’avant des films qui nous rappellent qu’on est tous et toutes ensemble dans ce même bateau qu’on appelle la vie. J’espère que la couleur Faradji sera multicolore!

CTVM.info — Le cinéma, c’est notamment des rencontres avec de beaux personnages de fiction et de documentaire?  Quel est votre personnage de fiction favori dans votre programmation long métrage cette année?

Helen Faradji — Évidemment, Amal, jouée par Lubna Azabal dans Amal, un esprit libre de Jawad Rhalib. Elle est de ces grandes héroïnes tragiques et courageuses qui m’inspirent et me passionnent. Mais je dois dire que j’ai une grande tendresse aussi pour Adam, le pauvre ado bullyé de toute part dans Adam change lentement de Joël Vaudreuil.

CTVM.info – Et quel est votre personnage de documentaire favori dans votre programmation long métrage de cette année?

Helen Faradji — Ouf, difficile question. Les documentaires cette année m’ont fait rencontrer des humain-es extraordinaires, vraiment. Le genre de personnes dont on se dit : « mais pourquoi ils

et elles ne sont pas plus nombreux? ». Je dois dire que j’ai particulièrement été touchée par la vulnérabilité de Freddy Dufour (imitateur de Michael Jackson, dans Michael et moi réalisé par Régis Coussot, Nicolas-Alexandre Tremblay, écrit par Régis Coussot et Nicolas-Alexandre Tremblay) et par l’incroyable Farah Sharifi, réalisatrice et « personnage » de My Stolen Planet qui retrace à travers ses archives personnelles toute l’histoire du droit des femmes iraniennes.

 

 

Photo : Freddy Dufour, imitateur de Michael Jackson, dans Michael et moi réalisé par Régis Coussot et Nicolas-Alexandre Tremblay

CTVM.info — Parlez-nous un peu du virage social que le festival souhaite donner au FCVQ depuis un an?

Helen Faradji — Ce serait enfoncer une porte ouverte que de dire que le monde est un peu déboussolé ces dernières années. Au FCVQ, nous avons la conviction que le cinéma peut nous aider à retrouver un peu le Nord. Et c’est dans cet esprit qu’on a voulu organiser la programmation : les deux pieds bien ancrés dans ce que l’on vit, afin de se rappeler du pouvoir incroyable d’union et de libération du cinéma.

CTVM.info — Parlez-nous un peu de votre cycle Ukrainien?

Helen Faradji — C’est une nouveauté dans l’idée d’une programmation axée sur les grands enjeux socio-politiques du moment, un cycle Ukraine nous paraissait essentiel. Ce sont 3 magnifiques documentaires, chacun abordant la guerre d’une perspective différente : Nice Ladies et sa troupe de pom-pom girls sexagénaires séparées par la guerre, In The Rearview, entièrement tourné dans une mini-van emmenant les Ukrainien.nes hors du pays et Zlata, portrait d’une petite de 12 ans qui vit en exil en Belgique. Les 3 films seront présentés par des membres de l’Alliance des Ukrainiens de Québec, sans qui nous ne pouvions imaginer présenter ces films.

CTVM.info — En terminant, parlez-nous un peu de votre foisonnante section de courts métrages? Quelle est l’orientation du FCVQ en matière de programmation de courts métrages?

Helen Faradji — Comme Marie-Elaine Riou est la grande manitou du court chez nous, je vais la laisser répondre à cette question. Mais je peux dire deux choses : l’orientation est d’abord de remettre la production locale, celle de la ville de Québec, en haut de l’affiche, et ensuite de présenter des programmes réunissant la crème des courts nationaux et internationaux pour se rappeler que le court est un art en soi, regorgeant de pépites et de signatures incroyablement fortes.

CTVM.info — Quel est le réalisateur vivant ou la réalisatrice que vous adoreriez inviter à Québec au festival

Helen Faradji — Je dirais Andrea Arnold. Ou encore Jonathan Glazer. 

 

 

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